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L’Aide Publique au Développement (Graphique)

Le concept d’APD s’est imposé comme la norme de référence en matière d’aide au développement.

L’aide publique au développement (APD) est la norme de référence en matière d’aide extérieure, adoptée en 1969 par le Comité d’aide au développement (CAD) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Est entendue comme « aide publique au développement » l’aide fournie par les États dans le but de promouvoir le développement économique et d’améliorer les conditions de vie dans les pays en développement.

Trois conditions doivent être réunies pour que des transferts financiers de pays développés à pays en développement soient considérés comme de l’aide publique au développement. Ils doivent être issus d’organismes publics (États, collectivités territoriales ou organismes publics), assortis de conditions favorables (dons, prêts dits concessionnels), et destinés à promouvoir le développement économique et le bien-être des pays concernés.

En 2014, le Comité d’aide au développement a choisi de réviser la manière dont est comptabilisée l’aide publique au développement, par l’intermédiaire de la méthode de l’équivalent-don APD. Cette méthode intègre de manière différenciée les dons et les prêts, selon la « part offerte » de ces derniers, c’est-à-dire celle qui fait l’objet d’un apport consenti de la part du donneur. En vigueur depuis 2019, cette méthode poursuit le double objectif d’établir une comparaison plus juste entre les efforts fournis par les donneurs, et d’inciter ces derniers à privilégier les dons aux prêts.

Rapportée au revenu national des pays avancés, l’aide publique au développement stagne

À la suite de l’adoption de l’APD comme norme de référence par l’OCDE en 1969, c’est la Commission Pearson, qui pour la première fois fixe un objectif quantifié en matière d’aide publique au développement. Formalisée par une résolution adoptée à l’ONU en 1970, cette proposition fixe à 0,7 % du PIB les efforts qui doivent être fournis par les pays avancés en matière d’aide internationale d’ici à 1975, voire 1980 selon les termes de la résolution. Par la suite, les pays donateurs à l’exception de l’Italie ont adopté un objectif selon lequel au moins 84 % de leur APD devait être constituée de subventions, proportion portée à 86 % en 1978.

En croissance de 3,5 % par rapport à 2019, l’aide publique au développement consentie par les pays membres du Comité d’aide au développement (CAD) atteint 161,2 milliards de dollars en 2020, soit la plus haute somme jamais enregistrée. Cette hausse s’explique par les dépenses exceptionnelles liées à la lutte contre la pandémie de Covid-19, estimées à 12 milliards par l’OCDE, dont 9 milliards auraient été dépensés par l’Union européenne.

Selon les nouvelles méthodes de comptabilisation, le total de l’APD en 2020 se répartit comme suit : 158 milliards de dollars sous forme de dons, de prêts à des entités souveraines, d’allégements de dette et de contributions à des institutions multilatérales, 1.3 milliard de dollars consacrés à des structures utilisant des instruments du secteur privé (ISP) axés sur le développement, et 1.9 milliard sous la forme de prêts nets accordés à des entreprises privées opérant dans des pays admis à bénéficier de l’APD.

Au cours des soixante dernières années, le montant de l’APD décaissée chaque année a été multiplié par quatre en termes réels, de 40 milliards de dollars en 1960, à plus de 160 milliards depuis 2019. Toutefois, cette croissance masque une baisse relative de l’effort consenti par les pays donateurs en matière d’aide publique au développement. En effet, plus que par le volume des flux financiers, l’effort consenti par les pays développés s’appréhende lorsque l’on rapporte cette contribution à leur revenu national brut.
Alors que le montant de l’APD décaissée par les membres du CAD en proportion de leur revenu national brut dépassait les 0,5 % en 1961, cette proportion a diminué au cours des années suivantes, pour passer sous le seuil des 0,3 % en 1973. Depuis, cette proportion s’est maintenue entre 0,3 et 0,35 %, pour parvenir à 0,32 % en 2020. Ainsi, seuls sept pays ont atteint ou dépassé le niveau de 0.7 % fixé par les Nations Unies : la Suède (1,14 %), la Turquie (1,12 %), la Norvège (1,11 %), le Luxembourg (1,02 %), le Danemark (0,73 %), l’Allemagne (0,73 %) et le Royaume-Uni (0,70 %). Parmi ces derniers, seule la Turquie n’est pas membre du Comité d’aide au développement, son ratio élevé s’explique par le grand nombre de réfugiés syriens dans le pays. Ainsi, alors que les montants d’aide publique au développement augmentent en volume, l’effort consenti par les pays développés décroit.

L’aide publique au développement se heurte à plusieurs problématiques

Convenue au terme de négociations houleuses au sein du Comité d’aide au développement et objet de plusieurs réformes depuis, le concept d’APD fait l’objet de contestations, portant à la fois sur la qualité de ses acteurs, ses modalités de comptabilisation, et sa définition.

Les dernières décennies ont vu une fragmentation progressive de la gouvernance de l’aide au développement. Alors que les agences gouvernementales se sont multipliées, et que le réseau des organisations internationales liées aux Nations Unies s’est densifié, de nombreux États autrefois récipiendaires d’aides ont désormais rejoint le bal des donneurs, que ce soit en Europe de l’Est, avec la Bulgarie, la Roumanie et les Etats baltes, ou en Asie, avec la Chine, la Malaisie ou encore la Thaïlande. De plus, la multiplication des organisations non gouvernementales et leur part croissante dans les flux financiers du développement depuis les années 1990 a largement contribué à complexifier la comptabilisation de l’aide publique. Les organisations philanthropiques comme la Fondation Bill & Melinda Gates créée en 2000 ont elles-aussi participé de cette fragmentation de l’aide au développement.

Aussi, l’aide publique au développement fait encore l’objet de divergences au sein du CAD, qui tiennent à la définition même de de l’APD. Le critère selon lequel les financements servent à la fois « le développement économique et le bien-être » fait l’objet d’interprétation diverses, selon que les efforts soient portés sur l’un ou l’autre des termes de la définition. Par exemple, certaines parties prenantes, qui ont fait du rattrapage économique des pays en développement leur priorité, ne sont guère satisfaites de l’inclusion de l’aide humanitaire dans l’APD, qui peut selon eux constituer une forme d’ingérence.

L’imprécision originelle de ce qui caractérise l’APD conduit également à des critiques qui portent sur l’aide liée. Entendue comme une aide accordée à condition que le financement soit utilisé pour acheter des choses au pays donateur ou à un groupe de pays très limité, l’aide liée fait l’objet de divergences pérennes, car d’aucuns la considèrent une forme déguisée de commercer. Alors que le Comité d’aide au développement tente d’en réduire la proportion, et que cette dernière a décliné jusqu’en 2003, elle est désormais de retour, et atteint presque 20 % de l’ensemble de l’APD en 2020. Ces données doivent être traitées avec précaution, tant l’opacité quant au caractère lié ou non de l’aide publique est difficile à déterminer.

Conclusion

L’aide publique au développement telle que définie par l’OCDE s’est imposée comme la norme de référence en la matière, les réformes quant à sa nature et à la manière dont elle est mesurée se heurtent à de nombreux obstacles. En proportion du revenu national brut, l’APD stagne aux alentours de 0,3 %, loin des 0,7 % auxquels les pays développés s’étaient engagés. De surcroit, si la réforme de l’équivalent-don ambitionne d’établir une comparaison plus juste entre l’effort fourni par les donneurs, et d’inciter à privilégier les dons, d’aucuns dénoncent les failles de cette nouvelle méthode, et craignent que l’ADP soit réduit à un outil d’influence économique, au mépris de ses ambitions initiales.

À terme, le Comité d’aide au développement porte l’ambition de voir émerger une norme de mesure qui permettrait de mesurer les contributions qui participent du Programme 2030 pour le développement durable. Si ses modalités sont encore en discussion, ce nouveau type d’aide devrait être enregistré sous le nom de Soutien public total au développement durable (TOSSD), et devrait constituer une catégorie distincte de l’APD.

Hugo Lacombe

Données :

  • https://stats.oecd.org/Index.aspx?lang=fr&DataSetCode=TABLE1#