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Évolution du ratio de fonds propres, 2008 à 2016 (Graphique)

 

Une banque a, parmi ses ressources, des fonds propres [1]. C’est la seule ressource non remboursable à son bilan, celle qui permet donc de constituer un coussin d’absorption des pertes. Une exigence de fonds propres est définie dans le règlement européen (CRR) afin de couvrir les pertes inattendues et de préserver la solvabilité des banques. L’exigence réglementaire de fonds propres est exprimée en fonction du risque des actifs. Plus une banque détient d’actifs risqués, plus elle doit détenir de fonds propres.

Les accords de Bâle 3 signés en 2010, en réponse à la crise des subprimes de 2008, ont conduit, une fois les recommandations transposées dans les droits nationaux, à un renforcement des exigences réglementaires de fonds propres. Le minimum réglementaire de fonds propres en pourcentage des actifs pondérés par les risques est passé de 8 % à 10,5 %, auxquels peuvent venir s’ajouter un supplément contracyclique (jusqu’à 2,5 % de plus) et systémique (jusqu’à 2,5 % de plus). Sur ce graphique, nous pouvons observer une tendance générale à la hausse du ratio de fonds propres pondérés des banques européennes. Pour la zone euro dans son ensemble, ce ratio est passé de 8,8 % en 2008 à 14,6 % en 2016. Cette hausse est moindre pour les États-Unis et les pays émergents qui passent respectivement de 9,8 % à 12,9 % et de 10,2 % à 11,6 % entre 2008 et 2016. Ces chiffres témoignent de la volonté des régulateurs de rendre les banques plus résilientes. 

Au sein de la zone euro, des écarts concernant la hausse de ce ratio sont notables. Pour les banques luxembourgeoises ce dernier est passé de 17,6 % en 2010 à 24,1 % en 2016 alors que pour les banques françaises, il est passé de 13,7 % à 14,5 % sur la même période. Aux États-Unis, on assiste à une quasi-stagnation du ratio après Bâle III (+0,3 point entre 2010 et 2016). Cependant, les banques américaines sont tenues de respecter un ratio de levier, c’est-à-dire une exigence de fonds propres exprimée en fonction du total des actifs, sans tenir compte des risques, supérieur au ratio de levier issu de Bâle 3, et qui a davantage progressé qu’en Europe. En effet, alors qu’en 2010 le ratio s’élevait à 8,7 % aux Etats-Unis, il n’était que de 4,7 % pour la zone euro.

Bien que les accords de Bâle III aient pour objectif de renforcer la résilience des banques à la suite du choc subi durant la crise de 2007, il demeure aujourd’hui difficile de déterminer l’impact sur le long terme de la crise sanitaire. En effet, dans un souci de flexibilité, les régulateurs ont permis aux banques de dégonfler leur coussin de fonds propres. Les décisions prises sont sur la forme intéressante, mais elles restent insuffisantes sur le fond.

Enfin, pour comprendre les différences de ratio entre pays, il faut se demander si les actifs des banques sont plus risqués ou encore si leur part dans le bilan des banques a augmenté depuis la crise de 2008 ? Par ailleurs, il est important de se questionner sur l’évaluation des risques par les banques. En effet, Christophe Nijdam explique que les banques peuvent procéder à une autoévaluation des risques lorsqu’elles disposent de modèles internes, leur permettant ainsi de déterminer le niveau de fonds propres qu’elles doivent posséder. Cela peut poser un problème de conflit d’intérêt étant donné que les banques peuvent être tentées de manipuler le ratio afin de minimiser les fonds propres qu’elles doivent détenir. De ce fait, la technique utilisée pour mesurer le risque (approche standard ou interne) a une influence sur la détermination du niveau de risque.

 

Hana Maazoun

 

[1] Capital de la banque constitué à partir des actions émises et des bénéfices mis en réserve.

[2] Rapport entre les fonds propres et les actifs pondérés en fonction des risques

[3] Source : BRI

[4] Cf fiche concept « Les coussins de fonds propres contracycliques » 

[5] Christophe Nijdam, « le véritable impact de Bâle III, 20 ans après » (Xerfi Canal)

[6] Jézabel Couppey-Soubeyran, Erica Perego & Fabien Tripier « Les banques européennes à l’épreuve de la crise du Covid-19 », Policy brief N° 32 FR – Mai 2020,  CEPII.